Mercredi 18 décembre, dans une salle du pôle de médecine physique et de réadaptation (MPR) de l’hôpital Saint-Jacques. Thaïs, 18 ans, livre le récit de l’accident qui l’a laissée paralysée il y a trois ans : « On partait chercher une copine et on s’est pris un arbre dans un virage. Le conducteur, qui avait consommé des stupéfiants, m’a laissée sur place. Mes potes n’ont pas contacté les pompiers. C’est un voisin qui a appelé. » À ses côtés, Kévin, 32 ans, victime d’un automobiliste qui lui a coupé la route alors qu’il circulait à moto : « Je suis tétraplégique C5-C6, c’est-à-dire que je n’ai plus de sensibilité sous les pectoraux. »
Face à eux, six jeunes de 14 à 17 ans, identifiés comme ayant des comportements à risque sur la route, et accompagnés par la mission prévention de la Ville de Nantes pour passer leur permis AM (anciennement brevet de sécurité routière).
« Un véhicule, c’est une arme »
Guidés par Francky Ménard, enseignant en activité physique adaptée, Thaïs et Kévin passent en revue les conséquences physiques, psychiques et matérielles de ces accidents. La trachéotomie « pour aspirer les glaires qui bloquent la respiration », les sondages quotidiens pour évacuer l’urine et les selles, la sexualité bouleversée, les travaux d’adaptation pour pouvoir regagner le domicile familial et les coûts : « 46 000 euros pour le fauteuil, 80 000 euros pour la voiture, 25 000 euros par mois pour l’auxiliaire de vie. »
Un peu plus tôt, Nicole, tétraplégique après avoir été fauchée sur un passage piéton, est venue passer le message : « Vous êtes jeunes, vous avez la liberté d’en profiter mais ne faites pas de bêtises. » « Un véhicule, c’est une arme. Et ça n’arrive pas qu’aux autres », martèle Francky Ménard.
Après ces échanges, les jeunes sont invités à essayer les fauteuils : « On voit vraiment ce qu’est la vie d’une personne en situation de handicap et on comprend à quel point c’est dur », témoigne Mahison. Le récit de Thaïs a ému Younès : « Ça m’a touché d’entendre qu’on l’avait abandonnée… Et on réalise que ça arrive vraiment à tout le monde. » Tous deux l’assurent, ils y penseront en prenant la route.
« La prévention, c’est du temps long »
Cet après-midi s’inscrit dans un parcours de prévention. « Nous avons identifié des jeunes de Port-Boyer et de Bellevue avec des comportements à risque et qui étaient intéressés pour passer ce permis. L’objectif est de les sensibiliser à la sécurité routière », indiquent Margaux Maillet et Stéphane Buton, coordinateurs de prévention à la mission prévention de la direction de la tranquillité publique. « Avant ce rendez-vous, nous avons déjà eu des modules avec simulateur de conduite et réactiomètre et simulation d’un accident de la route avec les pompiers. Aujourd’hui, l’objectif était de parler des conséquences des accidents. On voit bien qu’ils ne sont pas insensibles. Maintenant, ce n’est pas un coup de baguette magique. La prévention, c’est du temps long. On va continuer à tirer ce fil et travailler ces questions. »
Pour financer leur permis et les équipements de protection (casque, gants, gilet jaune), les jeunes nettoient en cette fin décembre les parties communes des immeubles du bailleur social Nantes Métropole Habitat (NMH). Au programme également : initiation au rugby fauteuil, rencontres avec les médiateurs de quartier et les agents de prévention de Naolib pour sensibiliser au partage de la route avec les transports en commun. Ils passeront leur permis pendant les vacances de février avant un temps de restitution en avril.
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